Messe de Psaumes
Version pour choeur mixte, 8 instruments à vent et orgue [2000] | durée: 31’00”
Conçue à l’origine pour un chœur d’hommes, la Messe des psaumes, commandée par l’Association des chanteurs tyroliens, se veut d’abord une musique d’usage courant, mais dans le meilleur sens du terme. Il s’agissait avant tout de donner une impulsion pour élargir le répertoire dans le domaine de la littérature chorale contemporaine, telle qu’elle est pratiquée notamment dans les grandes congrégations. Les conditions cadres étaient donc claires dès le départ : des exigences techniques et musicales modérément difficiles pour un chœur et une instrumentation correspondant à la pratique actuelle de la musique d’église dans le monde germanophone.
La messe est une tentative de combiner les limites de ces conditions cadres avec les exigences d’un vocabulaire musical contemporain. Dans ce contexte, le terme “contemporain” fait référence à la technique consistant à reprendre des éléments de la stylistique du XIXe siècle, qui jouent encore un rôle dominant dans la pratique actuelle de la musique d’église, et à les placer dans des contextes caractéristiques de la musique du XXe/21e siècle. Dans cette messe, la triade prend une signification centrale. La partie chorale est constamment triadique, la connexion des triades d’une part et leur coloration instrumentale par des dissonances caractéristiques d’autre part donnent à la musique son caractère “contemporain”.
Dans la disposition à grande échelle, je me suis préoccupé de la plus grande flexibilité possible. Les dix parties de la messe sont absolument modulaires dans leur objectif liturgique et ne doivent être comprises que secondairement comme un cycle. Certaines parties peuvent être omises, et un ordre différent peut être choisi (par exemple, le changement possible entre Sacrifice et Benedictus). Les parties Ouverture – Gloria – Sanctus – Conclusion sont à considérer comme le noyau de la Messe, mais le Gloria et le Sanctus en particulier peuvent aussi être utilisés comme parties individuelles, par exemple comme conclusion d’un autre arrangement musical de la Messe. Pour la seule exécution de la toccata pour orgue, il convient de choisir la version séparée avec introduction.
La partie d’orgue suit la tradition du colla-parte des messes classiques et, à quelques exceptions près, est principalement destinée à soutenir les autres instruments. L’enregistrement reste délibérément abstrait ; les quelques indications doivent être comprises comme une suggestion, et non comme une restriction.
Le choix des textes était tout à fait délibéré : ici, la poésie orientale rencontre la religiosité européenne. Le contexte œcuménique et multiculturel s’est révélé être le plus impressionnant dans le langage de Martin Luther.
Quelques remarques sur la nouvelle musique religieuse
le « péché originel » commun
Lorsqu’il est question de « nouvelle musique religieuse », bien peu de lecteurs ou d’auditeurs se rendent compte du fait que les termes « Eglise » et « Nouvelle musique » ont en commun des choses essentielles – plus qu’il n’en faut, pourrait-on dire. L’une et l’autre portent le fardeau de « péchés originels » – qui amènent une majorité de mes contemporains à se détourner par une sorte de reflexe dès qu’il est question d’ « Eglise » ou de « Nouvelle musique ».
la beauté comme un « appât » ?
Faut-il qu’un compositeur de nouvelle musique religieuse risque de faire partie des derniers fidèles, en s’accrochant aux attentes établies d’un auditoire spécialisé – qui sont une minorité de convaincus inconditionnels? Ou bien, le but de toute musique religieuse ne serait-il pas plutôt d’attirer les gens et de les « séduire » à entrer dans une église pour écouter une musique qui peut être « belle », indépendamment du matériel dont elle se sert?
« l’ autre » côté des sonorités nouvelles
Pour un auditeur en principe ouvert à toutes les impressions le chatoiement multicolore d’un cluster par exemple pourrait parfaitement correspondre aux coloris d’un accord de trois tons. Et le charme d’une mélodie pourrait aussi se manifester par des sons de flageolet…
un rêve utopique?
L’utilisation de moyens sonores compréhensibles qu’admet une majorité d’auditeurs, sans renoncer toutefois à des exigences artistiques telles qu’on peut les supposer dans la Nouvelle musique, n’est-ce pas la « quadrature du cercle »? Mais y a-t-il donc une destination plus importante pour tout art que celle de tendre vers l’utopie?
Martin Lichtfuss